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James et Hilda Bloggs coulent une retraite paisible dans leur jolie petite maison au milieu de la campagne anglaise. Ils sont tendres et n'ont l'un pour l'autre que des sourires et des mots doux. Leur quotidien s'écoule à un rythme tranquille, bien loin des soucis du vaste monde et des sourdes menaces de la guerre froide.
Mais un jour, leur poste de radio relaie des informations alarmantes : tensions ravivées, frappes imminentes... « Préparez-vous, la Bombe arrive !! », les prévient le gouvernement. Heureusement, James a rapporté de la bibliothèque un guide officiel de survie à une attaque atomique. Pas de panique donc, il suffit de suivre ses instructions le temps que l'alerte soit levée et tout rentrera dans l'ordre. À moins que ?...
Raymond Briggs, auteur britannique jusque-là connu pour ses albums jeunesse, fait paraître en 1982 cette évocation de l'apocalypse nucléaire mêlant tragédie et comédie. Charge féroce contre des États prêts à mettre en jeu la vie de toute une population pour gagner une confrontation internationale, Quand souffle le vent est toujours terriblement d'actualité. C'est également un récit intimiste d'une grande force émotionnelle. S'inspirant de ses propres parents, Briggs campe non sans une certaine causticité un couple de personnages aussi attachants que naïfs, mais toujours animés d'une force de vie qui les pousse à croire au meilleur, jusqu'à l'aveuglement. -
June est une jeune femme hypersensible qui déborde d'amour pour la nature et les animaux. Elle travaille dans un cabinet vétérinaire d'une métropole nord-américaine où elle vit avec Brad. Mais une opportunité professionnelle pour ce dernier les oblige à déménager dans une belle maison moderne au coeur d'un lotissement anonyme.
Pendant que Brad se consacre corps et âme à son nouveau travail, June se sent désoeuvrée et peine à se projeter dans ce nouvel environnement. Un jour, elle recueille une étrange créature mal en point et l'installe dans leur sous-sol. Une relation mystérieuse naît entre elle et cet être qu'elle baptise « Lenny ». Ce dernier se révèle drôle et attachant, mais peut-être pas tout à fait inoffensif...
Ouvrant la voie à de multiples interprétations, Oh, Lenny ne cesse de surprendre tout au long de son intrigue monstrueuse. D'abord huis-clos domestique retraçant l'évolution d'un ménage à trois grotesque, le récit mute petit à petit en drame horrifique qui joue de la fascination que peut exercer la nature sauvage, tour à tour belle et toxique. En plus de 300 pages dessinées dans un élégant style ligne claire, l'auteur du Dernier cosmonaute nous embarque pour un voyage aux confins de la folie, dressant au final un portrait de femme complexe et nuancé. -
Sur les routes sinueuses qui mènent à Syracuse, une voiture rouge fend l'air lugubre. Le conducteur, Matteo, mycologue de profession, se rend dans la ville de son enfance pour y donner une importante conférence. Mais entre la rencontre avec un auto-stoppeur inquiétant et une sortie de route inopinée, rien ne se passe normalement.
Enfin arrivé à destination, Matteo redécouvre une ville de Syracuse métamorphosée. À la recherche de repères, il erre dans la cité devenue labyrinthe de décombres et de souvenirs, et croise de vieilles connaissances : Carlo, Tancrède, Valentina... autant d'anciennes relations qu'il croyait disparues se débattent dans un monde corrompu par la Piovra Nera, organisation tentaculaire qui a la main mise sur la ville. En tant qu'ancien membre de cette pègre, Mattéo se retrouve se confronté à ses démons. Guidé par le speaker d'une mystérieuse radio pirate, il se lance dans une fuite éperdue. Rencontrée sur son chemin, la botaniste Grazia semble se détacher de ce monde de fantômes où le temps et l'espace obéissent à d'étranges règles...
Pour leur première collaboration, les deux auteurs proposent un récit de mafia teinté d'absurde et de fantastique dans lequel la gravité des thèmes abordés sont contrebalancés par la douceur du dessin de Duffour et l'onirisme du scénario d'Alexandre Kha. -
Nicolas Marlin, surfeur professionnel, traverse une passe difficile. Sa participation au contest de San Telmo, un spot qu'il déteste, s'avère encore une fois un désastre. Les vagues sont traîtresses, la chaleur étouffante, d'étranges manoeuvres militaires ont lieu dans la baie - et pour couronner le tout, son grand-père, un personnage charismatique mais autoritaire, réapparaît après plusieurs années d'absence.
La survenue d'une vague extraordinaire sera l'occasion pour Nicolas de se plonger littéralement dans sa mémoire et ses angoisses les plus profondes. Jouant avec les codes du récit de surf et convoquant une esthétique rétro inspirée des jeux vidéos des années 1990, emg réalise une oeuvre surprenante, à la fois grave et légère, tenant autant du conte psychanalytique que de la série B. Comme avec son premier album tremblez enfance Z46, emg propose un récit d'aventure trépidant et hors-norme qui explore les possibilités du dessin électronique.
Il met ici au point une sorte de pointillisme 2. 0 pour dépeindre les éléments déchaînés qui submergeront Nicolas Marlin. Et vous, êtes-vous prêt à affronter la vague gelée ?
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Premier album de l'autrice canadienne gg après plusieurs récits courts, Je ne suis pas là délivre une réflexion subtile sur l'impermanence des choses, la mémoire et l'aliénation. Une jeune femme, immigrée de seconde génération, s'occupe tant bien que mal de ses parents âgés. Seule face à ses responsabilités familiales, elle semble trouver un exutoire dans la pratique amateure de la photographie au cours de dérives urbaines.
Au cours d'une balade, elle photographie par hasard quelqu'un qui lui ressemble. Le récit bascule, l'héroïne se retrouvant confrontée à ce que sa vie pourrait être... Formellement, Je ne suis pas là fait à la fois preuve de sophistication et de sobriété. Avec son dessin semi-réaliste aux niveaux de gris profonds, un montage qui semble emprunter au cinéma de la nouvelle vague certains, gg parvient à créer une atmosphère trouble et mélancolique, à nulle autre pareille.
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Ville de Catalogne bâtie au coeur d'une zone volcanique, Olot est réputée pour être le seul endroit au monde, hors de l'Île de Pâques, où l'on peut trouver une statue moai. De ce point de départ, le narrateur met en exergue divers phénomènes troublants liés à la ville : meurtres en série, manifestations paranormales, comportements déviants ou encore observations d'OVNI. À en croire Dr Alderete, Olot est peuplée de pirates sanguinaires, de savants fous et autres amateurs de faits alternatifs. La mise en parallèle de leurs histoires dresse le portrait fragmenté d'une ville inquiétante, qui semble en proie à une malédiction. En alternance avec ces chapitres traités en couleurs, des passages en noir et blanc mettent en scène un mystérieux personnage anonyme, répétant un parcours quasi-rituel dans la ville et la zone marécageuse qui la borde. À l'instar des agents Scully et Mulder, Dr Alderete nous emmène aux frontières du réel avec ce récit à mi-chemin entre le documentaire et la fiction paranoïaque.
Sa ligne claire épaisse et ses compositions psychédéliques soulignent avec brio comment l'étrange peut pénétrer les interstices de la réalité...
Artiste prolifique, Dr Alderete est argentin et vit Mexique. Il a illustré de nombreux livres, dont plusieurs ouvrages sur l'Île de Pâques. Olot est sa première bande dessinée en tant qu'auteur complet. -
Six ans après son dernier opus War Songs, Ivan Brun revient à la bande dessinée avec un récit ambitieux mêlant critique sociale, polar et fantastique. Michel, jeune fonctionnaire borderline croise à Lyon Domingues, ancien mercenaire au Mozambique reconverti dans le proxénétisme. Quelques heures plus tard, le trafiquant se défenestre d'une tour du quartier de la Part-Dieu, entraînant Michel dans une dérive hypnotique. Shooté en permanence à un cocktail d'antidépresseurs et de Côte du Rhône, celui-ci se retrouve, comme sous l'effet d'un sortilège, aspiré dans la vie passée de Domingues. Meurtres, trafic d'armes, réseau de prostitution, pillages et guerres civiles se révèlent à sa conscience implosée. On suit une sédimentation du récit alternant scènes africaines et errances lyonnaises. Le cortège d'atrocités que connaît l'Afrique postcoloniale est mis en regard avec la violence symbolique de la société occidentale, qu'elle instaure par le biais de l'urbanisme, du monde du travail ou encore de la psychiatrie. Submergé par ses démons, l'individu se désocialise complètement. Sa descente aux enfers est d'autant plus terrible qu'elle n'est pavée que de faits documentés. D'un trait vif et charbonneux, Ivan Brun exprime toute la précision réaliste et politique de son travail à travers cette adaptation d'un roman de Tristan Perreton initialement publié en 2005.